vendredi 24 juin 2011

Lilt Line chroniqu'


 Lignes tendues (version allongée d'un texte paru dans ZOO n°32)


Une fresque abstraite et fragmentée aux couleurs flashy en dégradés rappelant autant les premiers survêt’ d’Agassi que les décors plats et froids du monstrueux Killer7. Un point blanc file entre ces lignes éclatées. L’ambiance est jetée avec lacérations sur rythmes dubstep d’espaces sans fond à la James Turrel. Libérer la ligne pixel vide !

Sur des routes aux contours anguleux irréguliers, un point est lancé à vitesse invariable. Son déplacement trace en écho une ligne souple fantôme. Quelque soit le niveau, le parcours défile sans accélération. Seul le dessin des bordures varie sur des angles de plus en plus aigus.

Si les premiers niveaux peuvent se jouer d’une main, (wiimote tenue à l’horizontale, l’incliner de bas en haut déplace le pixel), très vite on se sent enfermé sur ces montagnes en dents de squale. Les contours du circuit de plus en plus acérés. Le point lumineux est projeté sur les chemins d’une fresque éclatée aux frontières exigües, suivies de vastes plaines vides. La vitesse des variations modifie tant la perception de contrôle, perdu sur des fonds fluos ou contraint de passer brusquement d’étroits engorgements, que toute course éblouit. Mémoriser le dessin brisé d’une course relève du miracle ou de la claire intuition. Cette lutte contre l’aveuglement est due aussi à la durée des niveaux : moins d’une minute trente pour sortir du couloir victorieux, quelques secondes pour perdre. Les premiers essais sur les pistes les plus accidentées ont la fulgurance d’un éclair-souvenir.
Ce ne sont pas des labyrinthes : le pixel est lancé sur la trajectoire d’une seule ligne minimale, traversée sur fond d’un lent hip hop aiguisé d’accents bruitistes. A l’inverse des jeux Audiosurf ou Vib-Ribboon, les pistes ne sont pas générées en fonction des rythmes musicaux et chaque course est caractérisée par sa bande-son unique. Des beats ponctuent de barres verticales le parcours déroulé comme une partition. Leur traversée doit être validée d’une pression bouton indispensable. Chaque passage reconnu produit une série d’explosions fragmentées, éclatées en musique : à nouveau l’écran se masque de stridences colorées.  Peut-on jouer sans le son ? Oui mais c’est alors perdre des repères même furtifs.
Il n’y a pas de bonus pour protéger son pixel, ralentir la course ou adoucir les contours. Tout contact avec les bords atteint le score. Tout manquement en traversant les barres aussi. Vu comme la jauge de vie du point lumineux, un score maximal est donné au départ : zéro signifie game over.
Originellement sorti sur l’écran nomade tactile de l’iphone, LiltLine maintenant peut s’appliquer sur grand écran et projeter dans toute pièce ses tentacules cassés. On pourrait rêver d’une version moins limitée avec génération de parcours aléatoires sur une bande-son personnalisée et duels multijoueurs. Ou jouir d’un jeu justement concentré.

Lilt Line, téléchargeable sur wii 5€ ou iphone 2,39€

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